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BLOC NOTES: Semaine du 9 juin

In BLOC NOTES, SUJETS D'ACTUALITE on juin 22, 2014 at 11:38

10 juin.

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Annonce de grèves très dures à la SNCF. Le gouvernement avertit qu’il ne cèdera pas. Les syndicats concernés répondent qu’ils ne cèderont pas non plus. Pour leur part, les usagers consultent leur tableau de RTT, regonflent les pneus de leurs vélos ou sollicitent les sites de co-voiturage. De part et d’autre l’on péjore les intentions du protagoniste. Pour les syndicats, ce gouvernement dit de « gauche » mène une politique du temps de Thatcher. Pour le gouvernement de Manuel Valls, les syndicats français sont les plus ringards de la planète. Et si d’autres ressorts jouaient en vérité? La représentation mentale des Finances publiques est surdéterminée par celle de déficit, par l’image du tonneau des Danaïdes. L’Etat est à bout de ressources et ne peut distribuer, sous forme directe ou non, un argent qu’il n’a plus, ni augmenter la dépense publique tout en satisfaisant aux obligations drastiques de la Commission bruxelloise. Mais dans le système économique et social actuel, ce que dépense l’Etat nourrit en contre-partie le revenu de ses agents ou de ses affiliés. Prétendre réduire le déficit est certes louable. Comme il correspond symétriquement à des rémunérations, à des salaires, à des aides multiformes, la quadrature du cercle en fait un cercle plus rigide que l’acier. Au surplus, la dimension collective de l’existence ne cesse de s’éroder. Chaque individu se transforme en îlot souverain et renâcle lorsque l’on prétend toucher à ses clôtures… Le décalage devient ainsi béant entre les valeurs officielles de la république (le « vivre-avec », le désintéressement, le service public etc…) et les conduites effectives. Rappelons-le autant que nécessaire: aucune politique durable, à moins de se transformer en nécrose à visage étatique, ne peut se limiter à des mesures négatives, de restriction, de réduction d’effectifs, de licenciements, de ponctions fiscale, sans contre-partie. Autrement, c’est le principe même de l’Etat qui se trouve mis en cause. Toutes les idéologies se sont fracassées devant cette évidence. Comment retrouver la croissance qui permettrait de reformuler le schéma fondamental de la vie en commun, en repassant effectivement du « vivre-sans » à nouveau « au vivre-avec »? Nombre d’économistes affirment que les Trente Glorieuses ont été une parenthèse, qu’elles sont indissociables des reconstructions massives requises par l’après-seconde Guerre mondiale. Depuis l’achèvement de ces reconstructions, les besoins primaires des populations étant satisfaits, on ne sait plus par quoi les relayer de sorte à créer de nouveaux emplois, dignes de ce nom, et à stimuler une demande véritablement créatrice. Pour y répondre, il faudrait que les besoins de l’esprit et ceux de l’âme fussent érigés en données immédiates de l’économie politique. Non seulement ces besoins sont insatiables mais pour y répondre il suffit parfois d’un livre de poche ou de s’accouder au Pont des Arts. A condition, il est vrai, de pouvoir également payer son loyer.

12 juin.

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La diplomatie mondiale, occidentale en tous cas, semble frappée de torpeur devant les offensives éclairs des djihadistes en Mésopotamie. Les éléments armés de l’Armée Islamique en Irak et au Levant – en attendant l’Occident – se sont emparés de plusieurs villes et localités importantes, en y commettant de sanglants massacres de chrétiens et de chiites. Obama ne bouge pas et prend langue avec l’Iran. Tout se passe comme si à la Maison blanche l’on n’excluait plus une dislocation territoriale de l’Irak entre sunnites, chiites et kurdes, les uns et les autres sous les magistères antagonistes de l’Arabie saoudite ou de Téhéran. Après tout, dira t-on, l’Irak est un Etat artificiel, créé de toutes pièces dans la foulée du premier conflit mondial. Pourquoi ce qui a été ainsi monté ne serait pas aujourd’hui démonté? Pareil raisonnement serait simpliste et surtout dangereux. Les buts de guerre de l’AIIL ne sont pas limités à l’Irak. Ils visent à assurer l’hégémonie de cet islam- là non seulement dans tout le Moyen Orient mais partout où vivent des populations de confession coranique. Le feu commence à prendre sur le territoire européen, comme viennent de l’admettre les autorités allemandes et britanniques. Et que dire de la France… La question posée aux services de sécurité concernés et même aux responsables de la défense nationale s’avère d’une redoutable complexité: comment lutter contre un ennemi qui ne se reconnaît lié par aucune règle de droit ou de morale mais qui vous rappelle sans cesse aux vôtres? Il faudra bien trancher. Si la peine de mort a été abolie dans maintes démocraties contre les individus elle ne l’a pas été contre les démocraties elle mêmes.

15 juin.

Le dernier train de Gun Hill

Revu le fameux western de John Sturges: « Le dernier train pour Gun Hill » (1959). Deux acteurs d’exception tiennent les principaux rôles dans cette véritable Tragédie de l’Ouest: Kirk Douglas et Anthony Queen, le blond et le brun-noir. La femme du premier, sheriff de son état, une indienne – a été violée à mort par le fils de l’autre, gros propriétaire terrien qui croit pouvoir faire la loi chez lui. Mais le sheriff, Patt Morgan, ne l’entend pas de cette oreille et va chercher le violeur, lui même orphelin de mère, jusqu’au ranch paternel afin de le faire comparaître devant un tribunal dont la sentence est prévisible. Le père, Craig Belden, ne l’entend pas de cette oreille non plus. Le sheriff alors passe à l’acte et s’empare de vive force du fils à papa qu’il séquestre dans la chambre d’un hôtel, le colt braqué sur sa tempe en attendant qu’arrive le dernier train qui le conduira jusqu’à la prison, en attendant la comparution devant le tribunal fatidique et sans doute la pendaison du meurtrier. A ce coup de force, le père répondra par l’assaut en règle de l’hôtel. Pourtant les deux hommes sont amis. Mais rien ne doit résister à la Loi. Ils ne le seront plus. Et c’est dans la nuit embrasée par l’incendie de l’hôtel que le sheriff conduira le fils menotté, le canon d’un fusil à présent poussé sous la mâchoire, au train nocturne enfin arrivé. Le père et ses hommes de main suivent, guettant sa défaillance. En réalité c’est le fils qui en sera victime. La fin du film signée par le duel entre les deux pères meurtris est digne de l’Antique.

Il faudrait qu’Obama qui semble abonné à Disney Land se fasse projeter cette grande leçon de choses.

RD

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