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 SOUS LES BANLIEUES, LA BRAISE

In Uncategorized on juin 30, 2023 at 12:07

En France, l’automne 2005 n’aura pas seulement rougeoyé du rouge des arbres cuivrés par l’été indien. D’autres incendies se sont allumés dans nombre de banlieues, en région parisienne et en province lors d’émeutes si violentes, si intentionnellement déprédatrices qu’elles prenaient à certains moments les allures d’une  insurrection. Que les émeutiers se soient comportés comme les chebabs chers au caméras fascinées par l’Intifada proprement palestinienne n’étonnera que les badauds des agressions antisémites de l’automne 2000. Dans les circonstances actuelles le commentaire réactif est tentant. L’on ne s’y adonnera d’aucune manière. En revanche il importe au plus haut point de comprendre la cause persistantes de ces violences parfois si aveugles qu’elles font douter de l’équilibre mental de leurs auteurs. Car il y a eu, et il y a toujours, des banlieues sinon heureuses – qui pourrait s’avouer complètement heureux dans une société comptant 3 millions de chômeurs  soit, a minima, 10 millions de personnes inquiètes ! – en tous cas conviviales. Pour n’être pas encore bicentenaires, certaines d’entre elles se sont déjà constituées une mémoire presque familiale. C’est avec la larme à l’œil que l’on y assiste à l’implosion de ces immenses barres d’habitation – dortoirs construites à la va-vite dans les années 60 pour y loger, notamment, les centaines de milliers de rapatriés d’Algérie. Une anecdote à ce sujet. Un jour, à Eilat, discutant avec un maître nageur israélien, celui-ci me demanda où j’habitais. Je répondis : « À Paris  ». « À Paris ? » ,  s’exclama t-il, « À côté de Sarcelles ? ». Dans son esprit Sarcelles représentait la capitale du judaïsme français !  Longtemps, dans les années 60 et 70, j’ai fréquenté la cité de la Courneuve où habitait une partie de notre famille. Je n’ai pas le souvenir de m’y être trouvé en territoire caïnique, craignant le vol ou l’agression verbale. Depuis, qui douterait que la situation se soit gravement dégradée? Voici que ces lieux sont qualifiés de « territoires perdus de la République », qu’ils sont considérées comme de zones de non droit, des caïdats. S’y aventurer devient aussi périlleux que d’arpenter le pavé d’une rue barbare. La « crise »  économique, telle qu’on persiste à l’appeler, y est pour beaucoup mais elle n’est pas la cause unique de cette sorte de violence. Je le répète : dans les années 60 et 70 nous avons été des centaines de milliers à vivre dans ces cités HLM, dans ces bâtiments architecturalement minimalistes qui n’avaient pas encore été baptisées, par antiphrase, de « grands ensemble ». Pour beaucoup nous y avons fait nos études puis nous nous y sommes mariés pour fonder  les familles des nouvelles générations . Certes, dans ces années là le travail n’était pas raréfié. Il n’était pas non plus offert. Surmontant le traumatisme du déracinement violent, qui est devenu médecin, professeur de faculté, chef d’entreprise ou cadre supérieur n’a pas trouvé son diplôme dans une pochette surprise ni gagné sa promotion à la discrimination positive. Les décennies 60 ont connu également leur propre malaise. Sinon, les événements de 1968 se fussent ils déclenchés? Ajoutons que pour la communauté juive, très tôt, dès la guerre des 6 jours et de ses retombées en France, il a fallu s’accommoder d’une persistante maltraitance identitaire, faire front contre la stigmatisation systématique de l’Etat d’Israël  et ensuite contre le retour du passé vichyssois, puis, plus récemment, contre la pathologie du nouvel antisémitisme. Par ailleurs, la communauté juive ne s’est pas trouvée moins affectée que les autres communautés ou populations de France par le chômage, la précarité, le raccourcissement de l’espérance de vie professionnelle. Tous les services sociaux de la Communauté juive pourraient en témoigner. Quand, à quel moment, ces tensions physiques ou psychiques réitérées et cumulatives, y ont elles jamais autorisé des passages à l’acte de cette nature, si aveuglément violente, visant des écoles maternelles, des pharmacies, des gymnases, des commerces irremplaçables, des autobus, et aussi des personnes physiques de tous âges et de toutes conditions? L’explication par le malaise social et par la crise de l’emploi reste partielle. Autrement la France entière serait à feu et à sang. Un autre facteur doit être envisagé, explicitement identitaire. Un jour un journaliste de L’ Express me demanda ce que je pensais de la diatribe suscitée par les tentatives – ou ce qui fut présenté ainsi – de réhabilitation de la présence Française en ses ex-colonies. Ne risquions nous pas de glisser sur la pente fatale de la réhabilitation du système colonial, en cultivant, une fois de plus, un nouveau révisionnisme?  Je lui fis observer que s’il avait fallu réhabiliter le colonialisme, il n’était guère besoin de suborner les auteurs de manuel d’Histoire ;  que la présence sur le sol français de plusieurs millions de citoyens et d’étrangers d’origine maghrébine et africaine y suffirait quasi mécaniquement. Car comment expliquer ces « migrations » plus subies que voulues, suivant la terminologie du Ministère de l’Intérieur, sinon également par l’échec des pays ayant acquis par le feu et le sang leur indépendance contre la métropole française, ou qui y avait été précipités au début des années 60, sans aucune des transitions scrupuleusement observées désormais par l’ Union Européenne pour les ex-démocraties populaires ? L’époque est révolue où les spasmes sanglants , les faillites retentissantes, les émeutes populaires, les coups d’Etats et les guerres civiles qui ont enfoncé ces pays dans la ruine et dans une existence presque fictive, pouvaient être imputées à l’ex Métropole. Quoi de plus parlant en ce sens que ces réfugiés africains se précipitant sur les barbelés de la frontière marocaine tandis que des réfugiés marocains tentent de prendre d’assaut les frontières du Royaume espagnol? Une fois de plus, et une fois de plus à mauvais escient, le mot humiliation revient pour expliquer la déréliction de maintes banlieues. De quoi se nourrirait un tel sentiment? D’une xénophobie persistance? D’un racisme bavant, encore et toujours, au faciès? À compétences égales, de la discrimination à l’embauche? Du « containment » social et culturel qui sévit toujours à l’encore des personnes ayant eu le tort de naître de l’autre côté de la Méditerranée et qui tentent de noyer dans un accent empâté le sabir de leur parents et de leur grands parents? Qui le contesterait? Mais il est une autre source, non moins empoisonnée, de cette humiliation, telle qu’on la nomme. Elle naît de la prise de conscience insupportable d’avoir à vivre, par contrainte et par nécessité, dans le pays combattu, vilipendé, diabolisé il n’y a guère  et tout récemment encore, comme on l’a entendu lors de la commémoration des émeutes de Sétif en 1945 et de leurs impitoyable répression. Et cela, pour ceux que mine cette conscience déchirée, sans pouvoir ni vouloir revenir dans les pays d’origine, au Maghreb ou en Afrique sub-saharienne. Dans ces lieux de naissance, personnelle ou parentale, écoles primaires, pharmacies, gymnases, bus, et autres équipements collectifs, constituent un luxe souvent hors de portée de la quasi-totalité des habitants frappés par un chômage encore plus dur qu’en France, parce qu’il n’ouvre droit à aucune allocation, qu’il expose à des privations vitales portant sur les produits alimentaires et sur les produits pharmaceutiques, et à l’insondable mépris des Pouvoirs publics envers leurs administrés: à la hogra, comme elle est nommée en Kabylie.

Quels premiers enseignements en tirer, notamment pour la Communauté juive? Le traitement social et économique du malaise des banlieues ne suffira guère parce qu’il ne guérira  pas une si profonde brisure identitaire, cette véritable blessure de l’âme. Il est à craindre alors que ces mesures prise sur ce seul plan soient considérés comme des primes indues accordées à des violences erratiques, des mesures accentuées par un renforcement de la politique dite de « discrimination positive » confinant à une forme  retorse de discrimination tout court, puisque positive ou négative, elle n’opérera toujours qu’au faciès et au nom patronymique. Il faut espérer que les incendies de l’automne 2005 s’éteignent le plus rapidement possible dans ces cités d’étoupe et d’essence inflammable. Longtemps encore la braise y rougeoiera :  tant que le Bassin méditerranéen ne redeviendra pas une zone de véritable développement et, pour nombre de nos concitoyens, autre chose qu’une terre d’exil, un exil débutant souvent par une demande de visa touristique . 

Raphaël Draï, z »l, L’Arche, 30 décembre 2015

LE SENS DES MITSVOT: H’OUKAT

In Uncategorized on juin 29, 2023 at 9:40
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« Voici la règle (hathora), lorsqu’il se trouve un mort dans une tente (baohel): quiconque entre dans cette tente et tout ce qu’elle renferme sera impur (ytmah) durant sept jours; et tout vase (kéli) qui n’est pas entièrement clos d’un couvercle, sera impur. Quiconque touchera (acher ygâ), en pleine campagne (âl pnéi hassadé), au corps d’un homme tué par le glaive ou mort naturellement ou à un ossement humain ou un sépulcre sera souillé pendant sept jours. Pour purifier l’impur on prendra des cendres provenant de la combustion d’un purificatoire (hah’atat) auxquelles on mêlera de l’eau vive (maym h’aym) dans un vase » (NB, 19, 14 à 16). Bible du Rabbinat.

A l’évidence et une fois de plus les prescriptions précitées semblent renforcer les stéréotypes les plus ancestraux concernant le ritualisme d’Israël, son attachement à une pureté obsessionnelle et tout extérieure au point de méconnaître la vie de l’esprit et les aspirations spécifiques de l’âme. Il se peut aussi que ces prescriptions n’aient rien à voir avec ces dispositifs névrotiques et qu’au contraire elles soutiennent les exigences de cette vie spirituelle et la vie propre de l’âme déposée en l’Homme par le Créateur.

Car quoi que l’on fasse, et quelles que soient les élancements de notre vie intellectuelle, la mort est un fait et c’est par elle que s’achève, au moins temporellement, toute existence. Sans la dénier, il s’agit de savoir comment éviter qu’elle ne devienne, elle, une obsession au point d’ôter à l’existence présente toute motivation et toute perspective. Comme le dit le Roi agonisant dans la pièce de Ionesco: « Le Roi se meurt »: « A quoi bon naître si ce n’est pour toujours! ».

Mais une hégémonie ne se marque vraiment que dans un lieu clos, lui même sans ouverture et sans environnement. Qu’est ce à cet égard qu’une tente, en hébreu OHeL? Un lieu fermé? Sans doute non. Mais un lieu doté d’une protection contre les intempéries et simultanément d’une ouverture vers la transcendance. Les lettres qui forment le mot OHeL sont les mêmes que celles formant le mot HaEL: la divinité, celle qui promeut la vie puisque ce mot est à son tour formé sur le radical EL qui désigne toujours une direction, un aller-vers, ou une poussée vitale, comme dans ILaN, l’arbre. On sait qu’en hébreu le mot arbre se dit de deux façons; soit ÊTs, qui désigne son arborescence bifurquante, des racines jusqu’à ses ramilles; soit ILaN qui désigne sa croissance verticale.

Si, selon les circonstances, un mort se trouvait dans un lieu marqué par une pareille symbolique, intiment contradictoire, par où se profilerait le risque d’une nouvelle confusion entre la vie et la mort, il faut d’abord et avant tout reconnaître, avec lucidité, ce risque là. La notion d’impureté (au sens biblique de toum’a) en rendra compte. Comme si la mort recelait l’on ne sait quel pouvoir irradiant, quelle contagiosité psychique. Durant sept jours, ayant respiré de cet air là, il faudra alors se déconditionner réellement. Il n’en ira pas autrement si dans les mêmes circonstances l’on se trouvait en contact avec un vase non hermétiquement clos dans lequel cet air mortifère aurait pu s’insinuer et devenir par son usage ultérieur transmetteur de cette confusion morbide.

Et c’est sur ces points précis que le dispositif prophylactique ne se transforme justement pas en dispositif obsessionnel. D’une part l’impurification initiale n’est pas permanente et irréversible: elle dure sept jours, durée homologue à celle de la Création; d’autre part, il n’est question seulement que de vases ou de réceptacles non étanches. Les autres ne sont pas concernés, sous des modalités que l’on explicitera dans la Michna.

Si l’on était porté à assimiler ces prescriptions à une sorte de principe de précaution, l’on doit alors constater que celui-ci ne vire maladivement pas à la phobie. L’indication d’une limite à la limitation elle même est précisément ce qui distingue une règle morale ou juridique d’un conditionnement névrotique. Il n’en va pas autrement en cas de contact en milieu ouvert avec un cadavre ou avec ce qu’il en reste. Le contact (magâ) ne doit pas transformer en inoculation (négâ). Dès lors, les mêmes prescriptions s’avèrent applicables, selon la même intentionnalité.

Confirmant la cohérence de ce dispositif de retour à une vie détachée des fascinations éventuelles de la mort, l’on comprend mieux en quoi consiste la procédure – car c’en est une – de purification. L’on aspergera la personne en cause d’un liquide singulier constitué par les cendres d’un sacrifice nommé h’atat: la faute – ou la transgression: des cendres par nature résiduelles mais mélangées dans de l’eau vive. En réalité l’expression maym h’aym peut s’entendre d’une autre manière encore: le courant de la vie, laquelle finalement doit seule prévaloir.

                                    Raphaël Draï zal 26 juin 2014

LE SENS DES MITSVOT: KORAH’

In Uncategorized on juin 23, 2023 at 10:23

       A Daniel Draï, en souvenir de sa bar–mitsva

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« L’Eternel parla à Moïse en ces termes: « Parle aussi aux Lévites et dis leur: « Lorsque vous aurez reçu des enfants d’Israël la dîme (maâsser) que je vous donne de leur part, pour votre héritage, vous prélèverez là dessus, comme impôt (térouma) de l’Eternel, la dîme de la dîme (maâsser min hamaâsser) » »  (Nb, 18, 25, 26).  Bible du Rabbinat.

Certaines traductions du texte de la Thora sont réellement problématiques non seulement à cause de leurs contre–sens ou de leurs approximations mais en raison du pli qu’elles impriment aux dispositions précises et pratiques de ce texte. Ainsi en va t-il de la traduction précitée qui imprime aux prescriptions de volonté divine une tonalité surtout fiscale, engagée par la traduction de « térouma » en « impôt », alors que ce mot signifie offrande, comme le précise au demeurant cette même traduction à la paracha intitulée « Térouma ».

Et c’est donc cette tonalité fiscaliste qui risque de fausser le sens de l’institution nommée maâsser, traduit plus exactement cette fois par « dîme ». D’où ces deux questions emboîtées: quel est le sens de ce prélèvement, ou de cette contribution, pour tout Israël, et pourquoi les Lévites qui en étaient les destinataires devaient à leur tour et à leur niveau s’en acquitter également?

Le premier contre-sens est signalé par Chimchon Raphaël Hirsch. Pour le sens commun, la dîme consiste à prélever sur une quantité donnée le dixième de celle–ci. Ce sens là ne correspond pas à l’institution en question puisqu’un tel prélèvement se ramène finalement à réduire la quantité initialement donnée à 9 dixièmes de ce qu’elle représentait. L’opération est donc diminutive, amputatrice, d’où l’étymologie du verbe « décimer », de sombre résonance. Or l’institution de la dîme, entendu bibliquement comme maâsser, recèle une tout autre signification.

Il s’agit certes d’un décompte mais accompli de telle sorte que la dixième unité qui le constitue le constitue précisément non pas en une succession linéaire mais en un ensemble. Nul n’ignore en effet la symbolique du chiffre 10 dans la pensée biblique sinaïtique, qu’il s’agisse de la Création ou du Décalogue.

Le chiffre 10, marque le passage d’un ordre, celui des unités, distinctes les unes des autres, à un autre ordre, celui des dizaines qui les configure, on l’a dit, en ensemble d’un niveau supérieur. C’est pourquoi le mâasser ne se réduit pas à une opération fiscale mais concerne la formation du lien social, celui par lequel la subjectivité individuelle, reliée à celle d’autrui, devient inter-subjectivité, celle d’un peuple, d’un âm. De ce point de vue la racine ÂSseR est affine à la racine ÂTseR, que l’on retrouve notamment dans la solennité de Chemini Âtséret qui marque non pas la fin, au sens chronologique, des liturgies de Tichri mais leur aboutissement spirituel, leur accomplissement liturgique et leur plénitude sociétale.

C’est pourquoi les Lévites n’en étaient pas exemptés. Autrement c’eût été les exclure du modèle social et spirituel d’Israël. Il était bon de le préciser au regard, justement, des difficiles événements relatés au début de la paracha, relativement au coup de force tenté par Korah’ et ses affidés, eux aussi Lévites mais ayant, au moins pour un temps, perdu le sens de leur vocation et de leur mission. À aucun prix les Lévites ne doivent s’imaginer qu’ils forment un groupe singulier, séparé, si ce n’est une caste. Certes, ne disposant d’aucune possession personnelle ils sont confiés à la solidarité de leurs concitoyens. Mais ce statut ne les dispense pas de contribuer à leur tour, et dans leur orbe propre, à la formation du lien social qui relie entre eux tous les descendants de Jacob–Israël.

Avec une différence qui n’est pas une simple nuance. Comme le verset concerné l’indique, ils auront à prélever la dîme de la dîme. L’expression en hébreu n’est pas non plus simplement quantitative. Il ne s’agit pas d’ailleurs d’un prélèvement physique mais bien d’une extraction essentielle, d’une dîme au carré, si l’on pouvait user de cette expression, qui concerne la dîme elle même et non plus ses éléments matériels premiers.

Les Lévites sont les desservants électifs du Sanctuaire. Lorsqu’ils procèdent à leur propre maâsser ils forment non plus seulement des ensembles sociaux mais des entités spirituelles susceptibles de s’approcher de la Présence divine et de devenir le réceptacle des bénédictions qui en émanent, et cela chaque fois que l’aube réapparaît dans l’univers et plus particulièrement dans la conscience humaine.

                                                 Raphaël Draï z »l, 19 Juin 2014

LE SENS DES MITSVOT : CHELA’H LEK’HA

In Uncategorized on juin 15, 2023 at 7:13
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« L’Eternel parla à Moïse en ces termes: « Parle aux enfants d’Israël et dis leur de se faire des franges (tsitsit) aux coins de leurs vêtements (âl kanphé bigdéhem), dans toutes leurs générations et d’ajouter à la frange de chaque coin un fil d’azur (petil tékhélet) (…) afin que vous ne vous égariez pas à la suite de votre cœur et de vos yeux qui vous entraînent à l’infidélité (zonim ah’aréhem) » (Nb, 15, 37 et sq).

Cette paracha relate l’une des péripéties les plus tragiques de la Traversée du désert. Le groupe des chefs d’Israël envoyés par Moïse pour explorer la terre de Canaan en revient avec des paroles amères de découragement au point de provoquer la désespérance éplorée du peuple. La sanction divine conduira plus tard à rien de moins qu’à la future destruction du Temple de Jérusalem.

Pourtant sanction ne signifie pas damnation et lorsque dans le peuple une faille se révèle, aussitôt suit la prescription destinée à y remédier. En l’occurrence, il s’agit de celle concernant la contexture des vêtements que devront porter désormais les Bnei Israël afin de ne plus faillir à leur vocation. Contexture éminemment symbolique dont il faut comprendre le sens intime et son impact sur la définition des conduites et des comportements qui éviteront la répétition de la défaillance mise en exergue.

Aux quatre coins de leurs vêtements, homologues aux quatre directions de l’espace, les Bnei Israël devront désormais attacher des franges nommées en hébreu tsitsit. Ce mot est formé par le redoublement de la racine TS qui signifie ouverture, émergence, bourgeonnement, mais aussi lancer et trajectoire. Autant dire que dès le moment où ils se revêtent d’un tel vêtement, les Bnei Israël prennent conscience qu’ils se situent non pas dans un espace clos et statique mais en un espace vectorisé dans lequel il leur appartient de s’orienter, alors que le groupe premier des explorateurs les avait à la lettre désorientés, l’on dirait presque déboussolés.

Par la même cet espace dynamique s’oriente à son tour. D’espace strictement territorial, il devient espace spirituel et riche d’événements dans lequel un avenir se dessine tandis qu’un destin fixé d’avance, celui de l’esclavage rémanent, s’y efface progressivement. Le redoublement de cette racine signifie que ces événements là seront tout sauf impulsifs. Dès qu’ils se produisent ils sont investis par une pensée réflexive qui en fera paraître puis consolider le sens. Cette symbolique peut ainsi être qualifiée de symbolique concrète parce qu’elle se confirme par la confection proprement dite de ces tsistit mémoriels.

Chacun d’eux en effet est formé d’abord par quatre fils continus. On les fait passer et pendre ensemble à chacune de leurs extrémités par une ouverture ménagée à chacun des coins du vêtement. Huit fils dédoublés se retrouvent alors en attente de leur fixation. Celle-ci va consister à les réunir ensuite selon le schéma suivant, à partir de la dite ouverture: en quatre segments, de dimension différente, du plus bref jusqu’au plus long, séparés et unis chaque fois par un nœud, un kecher. Pourquoi un tel schéma?

Précisément parce qu’il donne à penser. Le redoublement initial des quatre fils rappelle qu’il n’est de réalité que placée sous le signe de la lettre Beth, qui désigne la dualité et l’altérité au sens éthique. Que les quatre segments du tsitsit ainsi conçu ne soient pas de la même dimension rappelle que toute réalité est une suite ou une combinaison de continuité et de discontinuité. De ce point de vue, la confection des tsitsit se corrèle à un autre mémorial: la sonnerie du chofar, elle aussi constituée par une combinaison de séquences discontinues (térouachevarim) et continues (tékiâ).

Cependant, pour que l’unité de l’ensemble soit préservée, il importe que ces segments soient réunis. Ils le seront par des nœuds. Qu’est ce qu’un nœud ? A la différence de l’entrave, un nœud se noue et se dénoue. Il symbolise simultanément l’attachement et la possibilité de se détacher mais sans rupture ni déchirure et devient symbole à la fois de responsabilité et de liberté.

Enfin, en chaque tsitsit se faufilera un fil spécifique, azuréen. Son nom est à lui seul programmatique puisque tékhlélet se réfère à takhlit qui signifie objectif, destination, finalité. Un vêtement configuré de la sorte n’est plus destiné seulement à protéger le corps des atteintes du froid ou de la chaleur. Il inscrit ce corps dans une histoire où chaque pas marque non pas un simple déplacement mais également un dépassement de soi.

Il s’agit juste de ne jamais l’oublier en chemin, surtout lorsque celui-ci est long, sans terme fixé d’avance, pourtant sans l’être jamais autant que la longanimité divine.

Raphaël Draï zal 10 juin 2014

LE SENS DES MITSVOT: PARACHA BEAÂLOTHEKHA

In Uncategorized on juin 8, 2023 at 7:56

«Tu distingueras ( véhibdalta ) ainsi les Lévites entre les Enfants d’Israël, de sorte que les Lévites soient à moi ( hayou li )» ( Nb, 8, 14 ). Bible du Rabbinat.

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Les institutions du peuple hébreu libéré de l’esclavage égyptien relèvent comme les institutions de toute autre collectivité humaine de l’histoire générale du droit. À ce titre il est légitime de se demander si le verset précédent n’institue pas une véritable caste sacerdotale qui se prévaudrait de son attache divine, ce qui la placerait en position d’extériorité et de supériorité au regard de l’ensemble du peuple hébreu, un peuple réduit à sa position profane et chargé d’entretenir cette caste possiblement parasitaire.

S’il faut se poser en effet la question, il faut la formuler également dans les termes mêmes du droit hébraïque concerné et comprendre les particularités de l’institution lévitique, en excluant d’ores et déjà l’hypothèse selon laquelle le peuple «vulgaire» occuperait une position sacrale moindre que celle du groupe survalorisé. C’est pourquoi dès le commencement de la paracha il est indiqué que si tous les jours de la Création, les grands prêtres, les cohanim, devaient préparer l’allumage des branches du Candélabre, de la Ménorah, il appartenait au peuple lui même d’en faire effectivement monter la Lumière. Ce qui n’est pas peu dire puisque la Ménorah du Sanctuaire correspondait à la Ménorah du Monde d’en-haut.

C’est donc bien au sein de ce peuple que les Lévites devaient être non pas distingués, au sens d’une quelconque discrimination nobiliaire, ni bien sûr ségrégés, mais bel et bien distingués. L’opération de havdalah est l’une des plus fondamentales de l’œuvre de la Création, du Maâssé Beréchit. Elle intervient dés le début de celle-ci lorsque le Créateur distingua assurément la lumière de la ténèbre, qu’il lui assigna un champ spécifique, au lieu de laisser ces deux éléments mélangés dans un chaos indistinct. De la même manière il distinguera les «eaux d’en-haut» et les «eaux d’en-bas» de sorte que l’univers ne fût pas une boule de matière confuse mais un espace-temps polarisé dans lequel il sera possible de se repérer. Ainsi l’opération dite de havdala implique à la fois la capacité de distinguer, comme on le ferait dans le noir optique, des éléments de nature différente mais aussi de discerner intellectuellement et spirituellement leurs fonctions en vue de leur accomplissement.

Il n’en va pas autrement des Lévites. Le nom même de Lévi est celui du troisième enfant né de l’union du patriarche Jacob et de Léah. Quelles sont les significations profondes discernables dans ce nom-là ? D’une part il est construit sur la lettre-pivot VaV dont la simple graphie révèle à quel point elle est communicatrice puisqu’elle se lit de la même manière dans un sens ou en sens inverse, ce qui déjà préfigure la fonction proprement lévitique, celle qui assurera à la fois la liaison des différentes composantes du peuple en chemin dans une direction donnée mais aussi la capacité d’y assurer en cas de besoin une «revenance », une téchouva vitale.

D’autre part, et cette fois d’un point de vue structural, le troisième fils ainsi nommé, l’est après ses deux premiers frères: Réouven (la vue) et Chimôn (l’écoute). Le nom de Lévi est celui qui lie entre elles ces deux sources de sens qui sollicitent la pensée. Ni l’écoute ni la vision, chacune à part soi, n’y suffit. C’est pourquoi lors du don de la Thora au Sinaï il est précisé par le récit biblique lu en hébreu que les Bnei Israël «voyaient des voix» pour souligner que leur capacité réceptive était maximale. Ingres n’était-il pas un grand peintre et un excellent musicien?

Au regard de ces significations, si l’Eternel, selon la prescription précitée désigne les Lévites comme «siens », ce n’est certes pas pour en faire un groupe à part, une confrérie mystagogique comme il en existait tant dans les peuples de ce temps. Au contraire. Les Lévites au sein du peuple diversifié, issu des douze fils de Jacob-Israël où ils sont disséminés, comme le sont les semences dans les sillons d’un champ intelligemment labouré, reçoivent pour fonction et pour vocation de se référer au Créateur par la Parole et dans les Pensées duquel toutes les composantes de la Création trouvent ou retrouvent leur unité et découvrent leur compatibilité: l’Eternel-Unifiant, ce qui est le sens premier du mot Eh’ad dont les deux premières lettres aleph et h’eth sont celles du mot AH’: frère.

La distinction divine n’exclut nullement la fraternité des Lévites. Au contraire: elle la commande. Et cela dans les deux sens d’une  réciprocité intimement vécue.

Raphaël Draï zal 3 juin 2014

1967-2015: UN BILAN

In Uncategorized on juin 6, 2023 at 10:18
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A quelques journées de la commémoration de la guerre dite des « Six jours » et qui, dans sa phase militaire offensive devait se déclencher le 5 juin 1967; après cinq décennies d’affrontements de toutes sortes: guerres conventionnelle, attentats terroristes de grande envergure et surtout guerre idéologique et propagandiste inlassable, il semble nécessaire de s’interroger sur la signification et la portée d’un conflit qui semble n’avoir décidément aucune fin prévisible. Parfois dans la communauté juive de France, les esprits sont sur ces sujets tellement désemparés qu’il importe de reconstituer quelques points de repère fondamentaux. Car un demi-siècle de guerre multiforme ne peut pas ne pas affecter une collectivité humaine non seulement de manière circonstancielle mais de génération en génération au point qu’en 2015 nombre de citoyens juifs de France s’interrogent sur un avenir possible et vivable dans la patrie des Droits de l’Homme. Or jusqu’en 1967 les relations entre la France bi-millénaire et l’Etat d’Israël étaient régis par une formule restée fameuse du Général de Gaulle: « Israël notre ami, notre allié ». Ces deux termes ne sont pas ornementaux, surtout le second lequel, au delà de toute implication affective, attestait d’une communauté d’intérêts entre les deux Etats. C’est sur cette base que les tensions nées entre l’Egypte nassérienne et l’Etat d’Israël furent initialement interprétées. Il allait de soi que le cas échéant de Gaulle donnerait suite à ce qui ne relevait pas d’un simple toast mais d’un engagement à la fois diplomatique et militaire. Hélas, pour qui l’aura personnellement vécue, qui pourra oublier l’angoisse térébrante qui saisit le peuple juif à la fin du mois de mai et au début du moins de juin 1967! Il est par trop facile de reconstituer l’Histoire une fois qu’elle est advenue mais durant ces semaines fatidiques, ce fut non pas le sort de telle ou telle frontière ou ligne d’armistice qui se trouva mis en cause mais l’existence même de l’Etat juif recréé en 1948. Et c’est à ce moment précis, alors qu’il semblait inéluctable que Nasser parvienne enfin à atteindre ses objectifs politicides que de Gaulle, contre toute attente, procéda à chaud et dans le pire des contextes à un véritable renversement d’alliances désignant l’Etat d’Israël comme un simple Etat du champ de bataille menaçant à fronts renversés l’existence de l’Egypte ou de l’Irak. D’où cette décision inique d’embargo qui n’affligeait que le seul Etat juif. On sait ce qu’il en résulta sur le plan militaire à partir du 5 juin et le retournement complet de situation que l’armée d’Israël infligea aux armées ennemies coalisées: Jérusalem-Est se trouvait à présent sous le contrôle des forces armées israéliennes. Pour la première fois des Juifs étaient en mesure d’y circuler sans entrave ni menaces. Entre-temps, et pour nous limiter à la France, des manifestations d’une ampleur inégalées s’étaient déroulées dans maintes villes, à commencer par Paris en solidarité avec la population d’Israël ouvertement menacée d’extermination. Pourtant dès les semaines qui suivirent, tandis qu’Israël faisait des ouvertures de paix à un ennemi battu à plate couture, se déclencha à l’ONU l’offensive idéologique et diplomatique qui allait cyniquement et méthodiquement permuter les rôles de David et de Goliath. Rappelons qu’au même moment la guerre du Vietnam faisait rage et que des procédés de propagande analogues étaient systématiquement mis en oeuvre par les ennemis des Etats Unis. Depuis prés de cinq décennies à présent cette forme de guerre n’a jamais cessé. Il en est résulté pour la France, et sauf remarquables exceptions, une stigmatisation qui semble désormais incurable de l’idéologie sioniste assimilée à celle d’un racisme d’Etat et à un apartheid impitoyable. Jusqu’au moment où la sociologie religieuse de la France ayant elle même muté sous l’influence de mouvance islamistes radicales, la vie des Juifs français se trouva mise en danger quotidien et sanglant. Ce n’est pas à dire que les institutions juives de France n’aient pas tout tenté afin de remonter ce courant calamiteux. Mais à la suite de Braudel il faut différencier les conflits de courte durée et ceux de longue et même de trop longue durée. Ceux-ci deviennent de véritables faits mentaux, transmis de génération en génération et qui finissent par acquérir l’autorité de la chose jugée. Combien de temps cette situation perdurera t-elle?

Il faut simplement être préparé à sa prorogation et en attendant ne pas oublier l’axiome des axiomes: « Tu choisiras la vie ». Il suffit de comparer l’état réel des pays belligérants arabes de 1967 et l’Etat d’Israël d’aujourd’hui pour en mesurer le caractère vital et assurément sans alternative.

                                 Raphaël Draï zal, 5 juin 2015

LE SENS DES MITSVOT: Paracha Nasso

In Uncategorized on juin 1, 2023 at 6:44
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«Ce fut au jour où Moïse eut terminé de dresser le Tabernacle qu’il l’oignit (vaymchah’otho), le sanctifia (vaykadech otho) ainsi que tous ses ustensiles, et l’Autel ainsi que tous ses ustensiles, et qu’il les oignit et les sanctifia (vaymchah’em vaykadech otham)»   (Nb, 7, 1). Traduction Artscroll.

L’onction est l’une des liturgies les plus énigmatiques de tout le récit biblique et même de toute la conception juive de l’Histoire et du salut divin puisque le mot Messie n’est rien d’autre que la traduction du mot hébreu Machiah, qui signifie: Oint. Mais pourquoi fallait-il que le Tabernacle fût oint à son tour, ainsi que les éléments entrant dans son édification, avec les instruments destinés à son usage? Et pourquoi fallait-il, également, que les vêtements du Cohen satisfassent à cette liturgie, tandis que l’huile d’onction devait au surplus couler le long de sa barbe? Rituels dont le sens s’est obscurci? Pratiques liées à des formes d’être et de pensée qui ne sont plus actuelles et dont nous ne recueillons que des traces sans mémoire vérifiable? Il est possible de le comprendre autrement et, une fois n’est pas coutume, l’on suivra à cet effet un commentaire du Zohar en tant qu’il éclaire, c’est le cas de le dire, cet ensemble d’interrogations.

Par quoi commence le processus de la Création, de la Bériah? Par une initiative du Créateur, certes, mais qu’étaye aussitôt une invite: «Soit: Lumière (Yehi Or)». Et sans délai, ni réticence, ni réserve, la Lumière, ainsi nommée défère à cette invite: «Et la Lumière advint (Vayehi Or) (Gn, 1, 3). Le propre de la Lumière est sa ductilité, le fait qu’elle ne présente aucune résistance, qu’elle transmette aussitôt que reçue l’expression de la dilection divine pour que les cieux puis la terre puis tout ce qu’ils contiennent potentiellement adviennent à leur tour.

Selon une autre assertion du Zohar, explicitée par toute l’exégèse des mékoubbalim, à l’origine, lorsque l’Humain fut créé, il le fut telle une entité intégralement spirituelle: entièrement lumière. Le corps matériel n’apparaîtra, précisément avec son opacité et ses résistances, qu’à la suite de la transgression première commise au Gan Eden. Une régression qui n’est pourtant pas présentée comme irrémédiable. Toutes les mesures qui s’ensuivent sont destinées à retrouver l’état de spiritualité prévalant avant la dite transgression, non pour nier qu’elle se soit produite mais pour affirmer que rien de fatal n’affecte définitivement la Création en général et celle de l’Humain en particulier. Il convient donc, pour y parvenir, que l’Humain se replace constamment et consciemment sous le signe du Or, de ce qui permet à la Création d’apparaître, d’être discernée, de faire foi de son existence. Affirmation qui fait aussitôt surgir une contradiction: comment concilier le corps humain, tel qu’il est devenu, ou tout autre élément matériel, avec la lumière tellement immatérielle que le Psalmiste affirmera au regard de l’Eternel: «C’est dans Ta lumière que la lumière se voit»? Ne suppose t-on pas le problème résolu? C’est en ce point précis que l’onction trouve son plein sens.

On le sait, elle ne peut se pratiquer qu’avec de l’huile. Tout autre liquide, le vin le plus rare, n’y servirait à rien. Pourquoi l’huile, en hébreu CheMeN? Pour deux raisons principales. La première est étymologique. Ce mot peut être lu Che-MiNMiN désigne l’origine, la provenance, le raccord d’un effet et de sa cause, d’une réalité et de sa source. La symbolique de l’huile récuse l’idée selon laquelle l’être, pour reprendre une phraséologie de tonalité philosophique, serait «jeté-là», à charge pour lui de se retrouver, pour autant qu’il en ait les moyens. Ainsi, la symbolique de l’huile est celle de la Présence divine et d’une Création douée de généalogie (Gn, 2, 4).

L’autre raison tient à l’une des particularités du Chemen. Toute matière qu’elle imbibe est susceptible, une fois allumée, de produire de la lumière, et de la lumière qui dure. On comprend mieux à présent la signification de l’onction: d’une part affirmer la prégnance de la Présence divine, car au contraire de l’eau l’huile ne s’évapore pas, et d’autre part, rappeler la vocation de l’entité humaine à sa prime spiritualité, à sa luminosité initiale, d’où la nécessité d’oindre tous les éléments mentionnés dans les versets précités.

Ce qui conduit à cette observation complémentaire. Par elle même, l’onction ne suffit pas. Elle doit être suivie et parachevée par une sanctification, laquelle atteste de l’adéquation entre la dilection divine et les démarches humaines. Cette adéquation n’est pas donnée d’emblée. D’où le passage de la Michna, lu à la prière de Arvit de chabbat et qui commence par «Bémah madlikim»? «Par quoi pouvons nous allumer?» et qui décline à la fois les sortes d’huile et les qualités de mèches compatibles ou non avec la sanctification chabbatique.

Ce qui apparaîtra avec plus de netteté encore lorsqu’on aura rappelé qu’en hébreu, hapétil, la mèche, est formé des mêmes lettres que le mot tep(h)ila: la prière, celle qui raccorde la lumière de chaque âme à celle du Créateur, de sorte que toute conduite adéquate à la Création, que chaque mitsva, devienne à son tour une onction, celle de la matière à laquelle elle se rapporte, selon cette autre affirmation du Psalmiste: «Car la mitsva est veilleuse (ner), et la Thora, lumière(Or)».

En ce sens, la mèche de la veilleuse, imbibée d’huile pure, capable de nourrir durablement une lumière vitale, devient l’équivalent de l’âme humaine lorsqu’elle s’alimente à la Lumière où s’alimentent toutes les autres lumières, intellectuelles ou physiques.

Raphaël Draï zal, 29 mai 2014